R. c. George

Cour suprême du Canada - [1966] R.C.S. 267


Ontario Droits ancestrauxLoi sur les IndiensTraité
Sommaire

La Cour suprême a refusé d’interpréter la Loi sur les Indiens comme reconnaissant la primauté des traités sur la législation fédérale – seule la législation provinciale doit respecter les traités entre la Couronne et les Indiens. Cette affaire n’est plus applicable, avec la reconnaissance constitutionnelle des droits issus de traités en 1982.

Question

Le traité de 1827 soustrait-il les Indiens Chippewa de l’application de la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs?

Décision

L’appel est maintenu et une déclaration de culpabilité est enregistrée.

Parties

Entre: La Reine

Et: Calvin William George  

Faits

En 1827, les Indiens Chippewa ont signé un traité avec la Couronne britannique. En échange de leurs terres, ils ont obtenu le droit de chasser tout au long de l’année pour se nourrir sur les terres qui leur étaient réservées.

En 1962, George, un résident de la réserve de Kettle Point et un Indien inscrit de la bande de Chippewa, tue deux oiseaux migrateurs (des canards) hors de la saison de chasse pour sa subsistance. Cet acte est interdit par le paragraphe 12(1) de la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs. Il a été inculpé en vertu de l’alinéa 5(1)(a) du Règlement sur les oiseaux migrateurs.

Arguments

George a soutenu que les termes du traité signé en 1827 le soustrayaient de l’application de la Loi, l’empêchant ainsi d’être accusé de l’infraction qu’on lui reprochait.

La Couronne a fait valoir que l’article 87 de la Loi sur les Indiens visait à rendre les lois provinciales, comme le Règlement sur ​​les oiseaux migrateurs, applicables aux Indiens sauf en cas de contradiction avec la législation fédérale.

Décisions des tribunaux inférieurs

Haute Cour de l’Ontario (1963) : Le juge a conclu que le traité de 1827 avait accordé aux Indiens un « intérêt sus-jacent » dans les terres qui ne pouvait être supprimé par décision du Parlement. Par conséquent, il a rejeté le recours de la Couronne.

Cour d’appel de l’Ontario (1964) : La Cour d’appel a également conclu que la Proclamation royale de 1763 accordait aux Indiens le droit d’utiliser les terres qui leur étaient réservées par la Couronne comme territoire de chasse. Puisque l’article 87 de la Loi sur les Indiens stipule que les lois du Canada s’appliquent aux Indiens à moins qu’un traité n’en dispose autrement, George n’était pas assujetti à la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs et son règlement d’application. Le juge Gibson qui était dissident a quant à lui conclu que le traité de 1827 ne concernait en rien les droits de chasse et de pêche des Chippewas. Par conséquent, la loi provinciale d’application générale, la Loi sur les oiseaux migrateurs, s’appliquait dans la réserve de Kettle Point en raison de l’article 87 de la Loi sur les Indiens.

Motifs

Jury

Fauteux, Abbott, Martland, Judson, Ritchie et Hall

Raison

La Cour suprême n’a pas jugé nécessaire d’établir une distinction entre la présente affaire et l’affaire Sikyea  également entendue par la Cour. Dans le jugement majoritaire rédigé par le juge Martland, la Cour a retenu l’interprétation de la Couronne. L’article 87 de la Loi sur les Indiens a pour but d’assujettir les Indiens aux lois provinciales d’application générale sous réserve des dispositions des traités et des lois du Parlement applicables aux Indiens dans la province. De plus, l’article 87 n’avait pas pour effet de reconnaître la prééminence du traité de 1827 sur les dispositions de la Loi sur Convention concernant les oiseaux migrateurs, puisque le traité avait pour objectif de mettre de côté des terres à l’usage des Indiens Chippewa et de leurs descendants en créant la réserve de Kettle Point.

Le but de l’article 87 de la Loi sur les Indiens était d’assujettir les Indiens aux lois provinciales d’application générale et non d’assujettir la législation aux traités. Les lois visées par l’article 87 sont celles relevant du pouvoir législatif provincial. Par conséquent, la mention des traités visait à assujettir les Indiens aux lois provinciales, et non à accorder une prépondérance aux traités par rapport à la législation.

Impact

Les événements relatifs à cette affaire ont tous eu lieu avant 1982, année où les droits ancestraux et issus de traités existants, y compris le droit de chasser pour se nourrir inclus dans les traités, ont été enchâssés dans la Loi constitutionnelle de 1982. Depuis lors, une loi provinciale d’application générale, même si elle est visée par l’article 88 de la Loi sur les Indiens, ne peut être appliquée à des autochtones si elle porte atteinte à un droit ancestral reconnu ou issu de traité. À la suite de l’arrêt Sioui, les droits issus de traités sont protégés contre les lois provinciales d’application générale s’appliquant aux autochtones par le mécanisme de l’article 88. (Olthuis, Kleer et Townshend  2008: 41; Hogg, 2008).

Voir Aussi

Sikyea c. La Reine, [1964] S.C.R. 642

Kruger et al. c. La Reine, [1978] 1 R.C.S. 104

Daniels c. White, [1968] R.C.S. 517


Sources

Hogg Peter W. 2008. Constitutional Law of Canada. Thomson : Scarborough.

Olthuis John, Kleer Nancy et Roger Townshend. 2008. Aboriginal Law Handbook. Carswell : Toronto.

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